Sébastien Frey a vécu l’âge d’or du championnat italien. Face à lui, Ronaldo, David Trezeguet, Alessandro Del Piero, Roberto Baggio, Gabriel Batistuta, Andrei Shevchenko, Filippo Inzaghi ou Hernan Crespo. La crème de la crème du football mondial. Un an seulement après son arrivée à l’Inter Milan en provenance de Cannes, le natif de Thonon-les-Bains s’est imposé comme un solide gardien de but du Calcio. Il fait même partie des trois meilleurs portiers étrangers de Serie A des vingt dernières années selon un classement de La Gazzetta Dello Sport. A travers son parcours, Sébastien Frey vous fait revivre le championnat italien des 90′ et des années 2000 de l’intérieur.


Sébastien Frey, que deviens-tu depuis la fin de ta carrière en 2015 ?
Je suis rentré sur la Côte d’Azur. Je joue plein de matchs d’exhibition à travers le monde avec la FIFA, l’équipe de France ou l’Inter Milan. Je profite de la vie après une carrière bien remplie.

Pendant l’hiver, tu as déclaré avoir survécu à un virus. Est-ce que ça va mieux aujourd’hui ?
Ouais, je suis sur la bonne voie. J’ai connu deux mois et demi compliqués en début d’année 2019. J’ai chopé un virus qui a failli me flinguer. Je vais être encore suivi lors des prochains mois. Mais je recommence à avoir une vie normale : marcher, profiter de la vie avec ma famille.

Revenons sur ta carrière. Tu es natif de Thonon-les-Bains. Comment as-tu percé ensuite à l’AS Cannes dans les années 90 ?
Je n’ai pas vraiment vécu en Savoie car mes parents ont rapidement déménagé à Nice. J’ai joué en débutants et en poussins à l’AS Vence. A partir des pupilles, je suis parti à l’AS Cannes. Lorsque j’étais en moins de 17 ans, j’ai joué mon premier match de Ligue 1.

A l’époque, l’AS Cannes était l’une des meilleures écoles de foot en France (ndlr : Cannes a formé notamment Zinédine Zidane, Patrick Vieira, Peter Luccin, Sébastien Frey…)
Oui, à l’époque c’était ce qui se faisait de mieux avec Nantes, Auxerre et Lyon. J’ai été champion de France en moins de 15 ans, moins de 17 ans et j’ai remporté la Coupe Gambardella en 1995 (ndlr : Victoire 2-0 contre Lens). Dommage que l’AS Cannes ait été relégué car le club avait des structures extraordinaires.

Le 20 septembre 1997, tu joues ton premier match de Ligue 1 à 17 ans lors de Cannes-Rennes (1-1). Comment Adick Koot, l’ex-entraîneur de l’AS Cannes, t’a appris ta titularisation ?
Nous étions en mise au vert à Saint-Vallier-de-Thiey. Le samedi en fin de matinée, les plus anciens de l’équipe jouaient à la pétanque. Nous, les jeunes, étions restés dans nos chambres. D’un coup, j’ai entendu l’ambulance arriver. Ç’a affolé tout le monde et nous sommes descendus dans le hall de l’hôtel. Le gardien titulaire de l’AS Cannes, Grégory Wimbée, s’est blessé à l’artère femorale en jouant aux boules. Le match était le soir et Adick Koot m’a dit : “voilà Seb, c’est à toi ce soir, j’espère que tu te sens prêt”. Moi j’avais un peu les jetons. Mais en même temps, c’était le rêve de toute ma vie. J’ai juste eu le temps de passer un coup de fil à mes parents et à mes deux meilleurs potes pour venir au stade Pierre-de-Coubertin. La rencontre s’est très bien passée. J’ai été élu homme du match. Je me souviens qu’après le coup de sifflet final, un journaliste était venu dans le vestiaire de Cannes pour m’interviewer. A l’époque, on pouvait le faire. Ce match Cannes-Rennes a été le début d’une belle aventure pour moi.

A l’issue de la saison 1997/98 de Ligue 1, Cannes finit dernier. Comment as-tu vécu cette saison sur le plan personnel ?
Comme la saison a été compliquée, j’ai été souvent sollicité. J’ai effectué une très belle saison sur le plan personnel. Beaucoup de clubs se sont intéressés à moi. Dès le mois de novembre 1997, l’AS Cannes m’a fait comprendre qu’il devait récupérer 15 millions de francs (ndlr : soit un peu plus de deux millions d’euros) s’il voulait réussir son passage devant la DNCG. J’ai été sollicité par l’Inter Milan et l’Olympique de Marseille. J’ai dîné avec Rolland Courbis. Pour moi, c’était un rêve. Mais l’OM ne proposait pas autant d’argent que l’Inter Milan qui mettait 13 millions de francs sur la table pour un jeune de 17 ans. L’AS Cannes a accepté et récupéré deux millions de francs avec la vente de deux autres joueurs. Ce qui lui a permis d’éviter une relégation administrative. Ça m’a fait de la peine de quitter le club comme ça mais j’étais obligé. A l’Inter Milan, j’ai vécu des choses extraordinaires. S’entraîner au quotidien avec tous ces champions, c’était magnifique.

« Chaque jour à l’entraînement avec l’Inter, j’avais les meilleurs joueurs du monde en face de moi. Je me disais que si j’arrivais à stopper leurs tentatives, j’arriverais à m’interposer devant tout le monde »

As-tu été déçu de ne pas partir à l’OM ?
Non, même si l’Olympique de Marseille était pour moi le plus grand club de France à l’époque. Je suis parti dans l’un des plus grands clubs italiens et sûrement le meilleur championnat européen de l’époque. J’ai été invité par l’Inter Milan à voir le quart de finale de Ligue Europa face à Schalke 04. J’ai assisté au match à côté du président Massimo Moratti. Il y avait 70 000 supporters à San Siro. Tous les gens se demandaient qui était ce jeune de 17 ans près de Monsieur Moratti. C’est impossible de s’installer à côté de lui au stade sans aucune raison. Puis l’info est sortie et mon aventure à l’Inter Milan a commencé.

A 18 ans, tu débarques à l’Inter Milan avec Mickaël Sylvestre, Ousmane Dabo et Zoumana Camara. Qu’espérais-tu en t’engageant à l’Inter Milan ?
Mon objectif était de devenir un grand joueur. Après, je savais que j’avais un monstre devant moi : Gianluca Pagliuca. Mais ça s’est très bien passé, il m’a accueilli, aidé et m’a fait progresser. Benoît Cauet a aussi été formidable avec moi. Il ne jouait pas la Coupe du Monde et a été le premier à m’aider. Je ne parlais pas italien au départ et il a été comme un papa pour moi à l’Inter Milan. Il a vraiment été important dans mon acclimatation. Il m’invitait à manger chez lui. Il m’a vraiment introduit dans ce pays et dans le Calcio de la meilleure façon possible. Au cours de ma première saison à l’Inter Milan, j’ai quand même joué neuf matchs (sept en Serie A et deux en Coupe d’Italie). C’était inattendu pour moi. Lors d’une rencontre sur le terrain de la Sampdoria Gênes, Gianluca Pagliuca s’est fait expulser. Je suis rentré et j’ai fini le match. Puis j’ai enchaîné lors d’Inter Milan-Fiorentina. Il y avait 72 000 spectateurs à San Siro. On gagne 2-0 et je suis élu homme du match.


A l’époque en France, c’était très mal vu de partir très jeune à l’étranger. Comment l’as-tu vécu depuis l’Italie ?
Je l’ai payé de ma personne. Quand j’ai signé à l’Inter à 18 ans, la presse française ne m’a pas épargné. On a dit que j’étais un mercenaire, que je partais seulement pour l’argent et que je n’allais pas y arriver. Quand j’ai commencé à gagner ma place en Italie, ç’a été une revanche personnelle énorme.

Raconte-nous ton tout premier entraînement à l’Inter Milan…
Tous les grands champions comme Youri Djorkaeff, Ronaldo, Taribo West, Gianluca Pagliuca, Giuseppe Bergomi, Roberto Baggio, Javier Zanetti étaient encore à la Coupe du Monde 1998. Lorsqu’ils sont revenus, il y avait environ 3000 spectateurs à chaque entraînement. Quand Youri est arrivé, les Français étaient fiers de parler du titre de Champion du Monde. Pour moi, une saison d’entraînement à l’Inter Milan correspondait à deux saisons pleines dans un autre club plus ordinaire.

Parmi tous les joueurs que tu as cités, lequel t’a le plus impressionné ?
Ronaldo. Je le dis depuis toujours. Il était spécial, à part. C’était le meilleur de toute sa génération. C’était extraordinaire pour moi de me retrouver face à lui à l’entraînement. Sans parler des séances de coups francs avec Roberto Baggio et de tirs-au-but avec Youri Djorkaeff. J’étais jeune, je faisais du rab à la fin de chaque entraînement. C’était un plaisir de me retrouver face à eux. Magique. J’avais les meilleurs joueurs du monde en face de moi. Je me disais que si j’arrivais à stopper leurs tentatives, j’arriverais à m’interposer devant tout le monde.


« En 2000, j’étais sollicité par Manchester United, la Lazio Rome et Arsenal. Mais Marcelo Lippi m’a appelé pendant les vacances pour que je reste à l’Inter. “Seb, surtout ne négocie avec personne. Tu es le présent et le futur de l’Inter Milan. Tu seras le gardien de but titulaire pour la saison 2000/01”. Du coup, le club a vendu Angelo Peruzzi à la Lazio Rome »

Un an après ton arrivée à l’Inter Milan, tu es prêté au Hellas Vérone où tu as véritablement explosé…
J’ai été élu meilleur gardien et meilleur joueur du championnat italien 1999/00. J’ai vécu une saison extraordinaire. J’ai pu montrer mes qualités. C’est à partir de cette saison au Hellas Vérone que tout a commencé. 


Comment gagnes-tu ta place de titulaire à l’Inter Milan à l’été 2000 ?
Lors de mon prêt au Hellas Vérone, Marcelo Lippi était l’entraîneur de l’Inter Milan. Angelo Peruzzi était titulaire, c’était un monstre sacré en Italie. A l’été 2000, beaucoup de grands clubs m’ont sollicité comme Manchester United, la Lazio Rome et Arsenal. Moi, je voulais revenir à l’Inter Milan mais pour être titulaire. Je me souviens de ce coup de téléphone lorsque j’étais en vacances. A l’autre bout du fil, Marcelo Lippi : “Seb, surtout ne négocie avec personne. Tu es le présent et le futur de l’Inter Milan. Tu seras le gardien de but titulaire pour la saison 2000/01”. Du coup, l’Inter Milan a vendu Angelo Peruzzi à la Lazio Rome.

Deux ans après ton arrivée en tant qu’espoir du club, comment as-tu réussi à t’imposer à l’Inter Milan en tant que gardien titulaire ?
J’avais 20 ans quand je suis revenu de mon prêt au Hellas Vérone. Sincèrement, je ne me suis pas posé de questions. Malheureusement, je n’ai pas eu l’opportunité de jouer la phase de groupes de la Ligue des Champions car l’Inter Milan s’est fait sortir lors du tour préliminaire par Helsingborg.

Tu as eu l’opportunité de jouer une saison avec Laurent Blanc à l’Inter Milan…
Lolo, avec qui je suis toujours en contact, a été très important par son charisme. C’est un mec très souriant et qui ne se prend pas la tête. Son expérience nous a aussi beaucoup apporté. C’était un peu l’exemple. Pour devenir un grand joueur, il fallait se baser sur Laurent Blanc

Pourquoi es-tu parti à Parme en 2001 ?
Sur le plan collectif, la saison de l’Inter Milan a été un peu compliquée (ndlr : l’Inter a fini cinquième de Serie A en 2000/01). A l’été 2001, je sentais qu’il y avait moins de certitudes dans le club. Je n’ai pas eu la sensation que l’Inter voulait construire une grosse équipe sur le long terme. Moi je voulais poursuivre ma progression et travailler dans les meilleures dispositions. A l’époque, Francesco Toldo a signé à Parme mais le contrat n’a pas été déposé. Du coup, je me suis engagé à Parme, lui à l’Inter Milan et Gianluigi Buffon à la Juventus Turin. A cette période, j’étais l’un des gardiens les plus chers : environ 23 millions d’euros.

« A Parme, j’ai côtoyé Claudio Taffarel. C’était ma doublure. J’ai aimé son charisme et sa gentillesse. Grâce à lui, j’ai beaucoup progressé. J’ai adoré être entouré ou confronté aux meilleurs du football mondial. Ils étaient d’une telle simplicité. C’était hallucinant même. Ils m’ont aidé à garder les pieds sur terre »

As-tu ressenti une certaine pression en remplaçant Gianluigi Buffon à Parme ?
Non, rien du tout. J’arrivais quand même de l’Inter Milan donc en position de force. Je n’ai jamais pensé à Gianluigi Buffon lorsque j’ai débuté à Parme. Malheureusement, nous avons été sortis dès le tour préliminaire de la Ligue des Champions face à Lille en 2001. J’ai mal vécu cette élimination. Pas parce que c’était Lille mais parce que j’avais connu la même mésaventure la saison précédente avec l’Inter Milan. 

Quels sont tes meilleurs souvenirs à Parme ?
A Parme, j’ai vécu des moments magnifiques. En quatre saisons, j’ai été élu trois fois meilleur gardien de but du championnat. Même si la première saison a été compliquée, (ndlr : Parme a fini dixième de Série A), nous avons remporté la Coupe d’Italie contre la Juventus. C’est le seul trophée d’équipe que j’ai à la maison. En plus, j’ai côtoyé Claudio Taffarel. C’était ma doublure. J’ai aimé son charisme et sa gentillesse. Grâce à lui, j’ai beaucoup progressé. J’ai adoré être entouré ou confronté aux meilleurs du football mondial. Ils étaient d’une telle simplicité. C’était hallucinant même. Ils m’ont aidé à garder les pieds sur terre.

Entre 2001 et 2005, Parme a légèrement décliné au niveau des résultats. Comment as-tu vécu les choses de l’intérieur ?
Je ne suis pas d’accord. Après la victoire en Coupe d’Italie, c’est Cesare Prandelli qui s’est installé sur le banc de Parme. On a fini deux fois quatrième de Série A en laissant des monstres sacrés derrière nous. En plus, nous avions une superbe équipe : Adrian Mutu, Adriano, Hidetoshi Nakata…Cette génération était extraordinaire. Comme moi, cette génération avait besoin de tranquillité pour travailler. Adriano avait une lourde frappe de balle, j’ai même pris quelques tirs dans la tronche (rires). A chaque entraînement, on s’éclatait.

Pourquoi es-tu parti à la Fiorentina en 2005 ?
Parme avait des problèmes financiers. Il fallait trouver des solutions et j’étais un joueur à forte valeur tout comme Alberto Gilardino. Je pense que si le club n’avait pas fait faillite, nous serions restés à Parme car c’est une ville vraiment extraordinaire. Tu vis bien, tu manges bien, le climat est cool. C’est un grand club, sans la pression du grand club. Quand tu es jeune et que tu as besoin de gagner en expérience, Parme est le club idéal. J’ai pu jouer sereinement pendant quatre ans et exprimer mes qualités sur le terrain. Mais à l’été 2005, je me suis mis d’accord avec la Fiorentina qui avait un beau projet de reconstruction.

Comment tu t’es senti à la Fiorentina ?
Je suis arrivé en tant que “Première Dame”. La Fiorentina a aussi acheté Luca Toni cet été-là. Je me suis dit : “là, il va se passer quelque chose de bien et d’important”. C’est ce qui s’est passé d’ailleurs. Malheureusement à la mi-saison 2005/06, j’ai été victime d’une grave blessure à un genou qui aurait pu compromettre toute ma carrière. C’était lors d’un match de Coupe d’Italie face à la Juventus : je fais une sortie dans les pieds, le joueur ne saute pas et me tacle le genou. La Fiorentina a fini la saison à la quatrième place. Ensuite, j’ai fait de gros efforts pour pouvoir jouer la Ligue des Champions avec la Fiorentina.


« Le résultat du week-end de la Fiorentina influe sur l’humeur des gens à Florence en début de semaine. Quand on gagnait, on sentait les gens heureux. Quand on perdait, ça klaxonnait dans tous les sens le lundi et le mardi »

Après deux échecs au tour préliminaire de la C1 en 2000 avec l’Inter Milan et en 2001 avec Parme, tu as pu enfin goûter à la Ligue des Champions…
En C1, la Fiorentina a montré un très beau visage. Malheureusement, on s’est fait escroquer en huitième de finale. Au match aller, on gagne sur le terrain du Bayern Munich en 2009. Au retour, l’arbitre a accordé un but alors que le joueur munichois était hors-jeu de quatre mètres. Il a d’ailleurs été suspendu à vie de compétition européenne après cette rencontre. C’est vraiment un mauvais souvenir car on a battu Lyon, Liverpool à domicile et à l’extérieur. C’est une exploit ultra-rare dans l’histoire. En 2008, on a été reversé en Europa League et la Fiorentina a réussi un superbe parcours. En demi-finale aller, on accroche le 0-0 sur la pelouse des Glasgow Rangers. On refait 0-0 à la maison. Le match se termine aux tirs-au-but et la Fiorentina se fait sortir. C’était très frustrant car j’ai arrêté le premier tir-au-but des Glasgow Rangers. Derrière, on en a loupés trois…  

La Fiorentina était un club phare des années 90 avec Gabriel Batistuta. Avais-tu l’impression d’être toujours dans un top club malgré la relégation de 2002 qui avait fait beaucoup de bruit ?
Le club est pratiquement reparti en amateurs Notre génération a permis à la Fiorentina d’être de nouveau l’un des meilleurs clubs d’Europe. Pendant quatre ans, tout le monde nous respectait. J’ai aussi beaucoup aimé les supporters de la Fiorentina. Ils sont extraordinaires. Ils vivent pour ce club. Le résultat du week-end influe sur l’humeur des gens en début de semaine. Quand on gagnait, on sentait les gens heureux. Quand on perdait, ça klaxonnait dans tous les sens le lundi et le mardi. Ces habitants ont un tel amour pour ce club. Artemio-Franchi était toujours plein. Les supporters de Parme étaient aussi présents, respectueux mais moins chaleureux. J’ai vécu six ans magnifiques à la Fiorentina. Les supporters me respectaient tellement. Ce fut l’une des plus belles parenthèses de ma carrière.

De 1998 à 2011, as-tu eu une ou plusieurs opportunités de revenir jouer dans le championnat de France ?
En 2011, il y a eu un contact avec le Paris Saint-Germain. J’étais en concurrence avec Salvatore Sirigu. L’Atletico Madrid était aussi sur le coup. Quitte à revenir en France, le PSG aurait été une option royale. Les Qataris avaient un superbe projet. Ils ont redoré le blason du championnat de France. Avant 2011, à l’étranger, les gens disaient que la Ligue 1 était devenue très moyenne.

Pourquoi as-tu signé au Genoa en 2011 ?
J’étais en situation conflictuelle avec le directeur sportif de l’époque à la Fiorentina. En 2009, j’avais pourtant renouvelé mon contrat. Mais il m’a mis des bâtons dans les roues. Sur le plan personnel, c’était aussi compliqué car j’étais en plein divorce. Gênes était la ville parfaite, j’étais à 50 minutes de mes enfants et à 1h10 de chez moi à Nice. C’est pourquoi je suis parti là-bas : dans ce club antique et respecté. Sur le plan footballistique, ça s’est très bien passé. J’ai réalisé deux très bonnes saisons sur le plan personnel même si on a joué la relégation jusqu’au bout. Deux ans à Gênes, c’est comme si j’avais fait cinq ans dans un autre club tellement le stress était important. J’y ai vécu cependant une belle expérience.

Parmi tous les grands attaquants que tu as rencontrés en Italie, lesquels t’ont le plus mis en difficulté ?
Zlatan Ibrahimovic, Alessandro Del Piero pour ses coups-francs, David Trezeguet. Lui avait un sens du but unique. Quand tu jouais contre la Juve, il fallait faire attention car tu ne voyais pas David pendant 85 minutes mais tu savais qu’il pouvait te planter à tout moment. Sinisa Mihajlovic était lui aussi très impressionnant sur coups francs.

«  Psychologiquement, mon expérience à Bursaspor m’a usé et j’ai décidé d’arrêter le football. Je n’avais plus rien. J’aurais pu continuer, j’avais beaucoup d’offres, mais je n’étais plus motivé. Je respecte ce sport, cette profession, et j’ai préféré laisser une belle image »

Pourquoi as-tu opté pour la Turquie (Bursaspor) en 2013 ?
Je voulais partir et découvrir une dernière expérience loin du championnat italien. Bursaspor a vraiment insisté pour me récupérer. D’un point de vue humain, j’ai passé deux saisons extraordinaires. Sur le plan footballistique, j’ai vécu une très belle première saison. Lors de la seconde, tous les dirigeants qui avaient une mentalité européenne ont été écartés. Ils ont repris un staff 100% turque, assez nationaliste. Petit à petit, les étrangers ont été écartés, moi en premier. Je n’ai jamais joué, je m’entraînais tout seul. J’étais en conflit permanent avec le club. Les dirigeants me disaient : “on ne te respectera pas si tu restes”. J’avais encore un an de contrat mais j’ai décidé de partir. J’ai porté plainte auprès de la FIFA pour mobbing et j’ai gagné le procès. Psychologiquement, cette expérience m’a usé et j’ai décidé d’arrêter le football. Je n’avais plus rien. J’aurais pu continuer, j’avais beaucoup d’offres, mais je n’étais plus motivé. Je respecte ce sport, cette profession, et j’ai préféré laisser une belle image.

Comment as-tu vécu l’ambiance dans les stades en Turquie ?
L’ambiance est juste magnifique. Tu te croyais en finale de Ligue des Champions. Au niveau des infrastructures, ils sont deux fois meilleurs qu’en France ou en Italie. Notre centre d’entraînement était tout simplement magique. Malheureusement, ils n’arrivent pas à s’ouvrir au niveau de la mentalité. Lors de la dernière saison, nous, les joueurs étrangers, avions tenté de créer un syndicat pour protéger les joueurs du championnat turc. Là-bas, si tu fais un truc qui ne leur plaît pas, ils t’envoient t’entraîner tout seul, ils ne te payent plus. Les contrats des joueurs turcs ne sont pas déposés à la FIFA. Juste à la fédération turque. Heureusement les contrats des joueurs européens sont approuvés par la FIFA.

Propos recueillis par Clément Lemaître

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