Actuellement entraîneur à Hyères, Lilian Compan a accepté d’ouvrir l’album souvenirs de sa carrière de joueur pour Foot d’Avant : de l’AS Cannes de Guy Lacombe à son dernier but en Ligue 1 inscrit au Parc des Princes avec Montpellier en passant par ses années galères à l’AJ Auxerre, sa période de renaissance à Saint-Étienne et ses trois belles saisons à Caen qu’il avait rejoint au départ à contrecœur. Entretien avec l’ex-attaquant qui s’est mis le public de Geoffroy-Guichard dans la poche en trois saisons.

 

Lilian Compan, que deviens-tu depuis la fin de ta carrière de joueur de football professionnel ?
J’ai fini ma carrière à Cannes en 2012. Puis j’ai coaché deux ans les U17 nationaux de l’AS Cannes et un an la DHR (Division d’honneur régionale). Ensuite, je suis parti trois ans à Saint-Étienne. J’ai d’abord été recruteur, après j’ai été entraîneur des attaquants du centre de formation et de l’équipe réserve. L’an dernier, j’ai entraîné les U19 nationaux de l’ASSE. Actuellement, je suis l’entraîneur de Hyères en National 2.

 

Tu as commencé à jouer en L1 en 1995. Quels souvenirs gardes-tu de tes débuts dans l’élite avec l’AS Cannes ?
A ce moment-là, Cannes avait l’un des meilleurs centres de formation de France. Nos formateurs nous amenaient le plus haut possible pour être prêt à jouer en Ligue 1 très tôt. C’était une bonne époque pour moi. Guy Lacombe m’a lancé en L1 mais c’est aussi lui qui m’a recruté à l’AS Cannes. L’homme est super sympa et très agréable. Quant au coach, il sait vraiment de quoi il parle. Ses conseils m’ont beaucoup aidé pour accomplir la carrière que j’ai réalisée. Pendant mes années à l’AS Cannes, j’ai joué avec Patrick Vieira. On a gagné la Coupe Gambardella ensemble en 1995. A l’époque, dans le onze type de Cannes, il y avait beaucoup de jeunes issus du centre de formation. C’était agréable car on savait comment jouer ensemble.

 

Comment Guy Roux t’a recruté à Auxerre en 1997 ?
C’était avant la Coupe du Monde des moins de 20 ans en Malaisie en 1997, avec les Thierry Henry, David Trezeguet, Nicolas Aneka, Mickael Landreau. Avant de partir là-bas, la France a joué un match amical contre la Suède à Auxerre. Il m’a détecté lors de cette rencontre. Je n’ai pas fait le meilleur choix en signant à Auxerre. Plus tard, je me suis rendu compte que j’avais fait une erreur en partant loin de ma famille et de mes amis.

 

« Chaque année quand je revenais à Auxerre, Guy Roux voyait en moi un très bon joueur mais il ne me faisait pas jouer. Ma valeur financière était trop importante par rapport à mon temps de jeu de l’époque. Les clubs venaient mais ils repartaient aussitôt car Guy Roux demandait trop d’argent »

 

Pourquoi tu n’as pas réussi à percer à l’AJ Auxerre ?
Je pense que j’étais un peu trop jeune pour partir. J’avais 20 ans. J’étais originaire du Sud (ndlr : Hyères). J’avais encore quelques paliers à franchir. Je suis arrivé dans un club qui jouait la Coupe d’Europe chaque saison. J’ai aussi connu des bons moments avec Auxerre mais j’ai très peu joué. La place en attaque était prise par l’avant-centre de l’équipe de France : Stéphane Guivarc’h. Pour moi, la barrière était trop haute. Mais en le regardant jouer, je me suis inspiré de lui.

Puis tu as été prêté à Châteauroux et à Créteil en Ligue 2…
Il fallait que je refasse mes gammes, que je marque des buts, que je me fasse un nom même si j’avais commencé très, très jeune en L1 et que j’étais en équipe de France Espoirs. A chacun de mes prêts, j’ai marqué une quinzaine de buts. Cela m’a permis d’acquérir de l’expérience et de rebondir par la suite.

 

Justement, tu rebondis à Saint-Étienne en 2002 (ndlr : l’ASSE était en L2 à l’époque)…
Chaque année quand je revenais à Auxerre, Guy Roux voyait en moi un très bon joueur mais il ne me faisait pas jouer. Ma valeur financière était trop importante par rapport à mon temps de jeu de l’époque. Les clubs venaient mais ils repartaient aussitôt car Guy Roux demandait trop d’argent. Heureusement, les prêts m’ont permis de me faire voir. Puis finalement, le transfert à Saint-Étienne s’est réalisé assez rapidement. C’était à la fin du mercato estival. Les Verts cherchaient un attaquant suite aux mauvais résultats obtenus en matchs de préparation. Moi, je ne voulais plus rester à Auxerre car Guy Roux me bloquait. Heureusement j’ai eu Frédéric Antonetti au téléphone à la fin août, son discours m’a plu. L’homme me plaisait déjà. D’être sous les ordres d’un coach comme Frédéric Antonetti, c’était un truc qui me bottait bien.

 

« Je pense que les supporters de Saint-Étienne ont aimé mes valeurs. Des valeurs de gagne qui ressemblent à celles des Verts. Je ne lâchais rien sur le terrain »

 

Quelles ont été tes premières impressions en arrivant à Saint-Étienne ?
Ça n’avait rien à voir avec ce que j’avais vécu avant. Pour moi, c’était nouveau de jouer dans un stade mythique. A l’époque, j’avais 25 ans mais j’avais l’impression de débuter ma carrière.

 

Tu gardes encore aujourd’hui une excellente image auprès des supporters des Verts. Pourquoi es-tu autant aimé à Saint-Étienne ?
Je pense que les supporters de Saint-Étienne ont aimé mes valeurs. Des valeurs de gagne qui ressemblent à celles de Saint-Étienne. Je ne lâchais rien sur le terrain. C’est ce qu’attendent les supporters des Verts.

 

A Geoffroy-Guichard, tu as vécu plein de belles soirées et notamment ce 22 mai 2004 quand Damien Bridonneau a offert le titre de Champion de L2 à l’ASSE (ndlr : 2-1 contre Châteauroux, 38eme journée)…
C’était mythique. Fabuleux. C’est dur de trouver des mots pour décrire ce que j’ai ressenti ce soir-là. Au début de la saison 2003/04, personne ne croyait en nous. Finalement, une équipe de copains s’est créée. Cette équipe de copains a réussi à réaliser quelque chose de super sympa ensemble. C’est l’un des plus beaux souvenirs de ma carrière. Je me souviens que le public de Geoffroy-Guichard nous a énormément poussés ce soir-là. Personnellement, j’étais lessivé en cette fin de saison. Mais c’était primordial d’avoir une ligne sur le palmarès de Saint-Étienne. Aujourd’hui, je peux dire que je fais partie de l’histoire de l’AS Saint-Étienne.

 

« J’ai choisi de rejoindre Caen en 2005 car j’ai senti que Saint-Étienne ne souhaitait pas me conserver. Je n’ai pas senti cette envie de la part d’Elie Baup. Puis l’ASSE voulait Sébastien Mazure. J’ai donc été intégré dans la transaction. Malheureusement à contrecœur »

 

A l’été 2004, Elie Baup a remplacé Frédéric Antonetti sur le banc des Verts. Qu’est-ce qu’il t’a dit en début de saison surtout que l’AS Saint-Étienne venait de recruter Frédéric Piquionne pour jouer en pointe ?
Personnellement, j’étais surpris du départ de Frédéric Antonetti car Saint-Étienne venait de monter en L1. Il y a eu beaucoup d’arrivées sur le plan offensif cette saison-là : Frédéric Piquionne, Pascal Feindouno, Anthony Le Tallec. En plus il y avait aussi Bafé Gomis qui sortait du centre de formation. La concurrence était importante. Je savais que j’allais moins jouer que les saisons précédentes. Mais j’ai décidé de continuer l’aventure car je me sentais bien à l’AS Saint-Étienne. Au début, Elie Baup m’a dit que j’allais débuter remplaçant. Petit à petit, il m’a donné sa confiance. Moi aussi j’ai travaillé dur pour la gagner.

 

Lors de ton dernier match avec Saint-Étienne, au Stade Gerland le 26 février 2005 (3-2 pour Lyon, 27eme journée de L1), tu marques lors du derby mais tu te blesses grièvement au tibia sur l’action du but…
Je ressens une grosse fierté d’avoir marqué lors du derby. Malheureusement je me suis cassé la jambe en inscrivant ce but. C’était mon dernier match sous les couleurs de l’AS Saint-Étienne. Si je devais le refaire, je le referais parce que je suis quelqu’un qui fait les choses à fond mais aussi parce que j’ai beaucoup d’amour et d’estime pour l’AS Saint-Étienne. J’aurais voulu poursuivre l’aventure avec le club et même pourquoi pas y finir ma carrière. Au moment où je me blesse, j’étais de plus en plus titulaire et cette blessure a cassé la dynamique.

 

Pourquoi as-tu choisi de rejoindre Caen en 2005 ?
J’ai choisi de rejoindre Caen en 2005 car j’ai senti que Saint-Étienne ne souhaitait pas me conserver. Je n’ai pas senti cette envie de la part d’Elie Baup. Puis l’ASSE voulait Sébastien Mazure. J’ai donc été intégré dans la transaction. Malheureusement à contrecœur et blessé. Je revenais à peine de ma fracture du tibia. Ce n’était vraiment pas facile pour moi. Malgré tout, j’ai réalisé trois belles saisons à Caen avec beaucoup de buts et une montée en L1 en 2007. Mes relations avec Franck Dumas étaient très bonnes. Ça s’est très, très bien passé pour moi au Stade Malherbe Caen. Le coach jouait l’offensive donc ça me convenait parfaitement.

 

« Beaucoup de gens disent que Caen est un club de bas de tableau, mais moi je trouve que le Stade Malherbe a tout pour devenir un grand club »

 

Tu as marqué plein de buts à Caen, mais deux ont marqué les esprits : ton but contre Reims (2-1, 36eme journée de la saison 20006/07) a permis à Caen d’être en bonne position pour la montée et ton magnifique but contre Toulouse en L1 (ndlr : voir la vidéo ci-dessous)…
Le but contre Reims a été très important. Ce soir-là, j’étais blessé. J’avais une élongation mais j’étais quand même sur le terrain. Je ne pouvais presque plus courir. Sans ce but, Caen ne serait pas monté en L1 en 2007. Quant au match de Toulouse, j’ai marqué un très beau but. C’était un but instinctif. Avec Caen, j’ai aussi été marqué par le derby Caen-Le Havre en 2006 (4-1). Ce soir-là, j’ai réalisé une passe décisive à Yoan Gouffran d’un retourné acrobatique. Beaucoup de gens disent que Caen est un club de bas de tableau, mais moi je peux trouve que le Stade Malherbe a tout pour devenir un grand club.

As-tu eu l’impression d’être poussé dehors en 2008 avec l’arrivée de Steve Savidan à Caen ?
Je ne me suis pas spécialement senti poussé dehors. J’ai senti de la concurrence avec l’arrivée de Steve et c’était normal. J’aurais pu rester à Caen à ce moment-là. Mais j’avais vraiment envie de me rapprocher de ma famille. J’avais 31 ans et l’aspect sportif me faisait tenir à Caen. Je ne me suis jamais trop bien adapté à la région. Même si c’est très beau, ce n’était pas facile pour moi car je suis originaire du Sud. En début de saison, j’ai dit que j’étais d’accord pour commencer ma quatrième saison à Caen. Mais j’ai rapidement senti que je n’avais pas la force ni le soutien de Franck Dumas sur l’aspect sportif. Je me suis dit : « si j’ai une opportunité pour partir dans le Sud, je la saisirais ». Elle est venue très rapidement de Montpellier.

 

Comment as-tu vécu la saison de la montée en L1 à Montpellier ?
C’est un peu la même histoire qu’avec Saint-Étienne. J’arrive dans un club que personne ne voit monter sauf Rolland Courbis. Dès mon arrivée, il me l’a dit. Même dans un livre, ça aurait été impossible d’inventer l’histoire de cette saison 2008/09. C’était une période géniale. La première saison, Montpellier monte et la deuxième saison le club finit européen. Je ne pouvais pas rêver mieux. J’ai peut-être fait le mauvais choix en partant en 2010. J’avais 33 ans, il me restait un an de contrat avec Montpellier mais j’ai décidé de finir à Cannes. Ensuite, je n’avais plus la force mentale ni la force physique pour continuer dans des divisions inférieures en National 1 et National 2. J’aurais dû finir ma carrière à Montpellier.

 

« J’ai marqué le dernier but de ma carrière pro face à Grégory Coupet. C’est un beau clin d’œil »

 

Tu as notamment marqué ton dernier but en pro avec Montpellier au Parc des Princes (3-1, 38eme journée) en 2010…
Ce soir-là, Montpellier l’emporte et se qualifie pour la Ligue Europa. Moi, j’ai marqué le dernier but de ma carrière pro face à Grégory Coupet. C’est un beau clin d’œil.

 

Enfin souhaites-tu ajouter quelque chose ?
Aujourd’hui je suis passé de l’autre côté du terrain. Je vis ma passion du football pleinement. Je suis fier d’être toujours dans ce milieu à 41 ans.

 

Propos recueillis par Thierry Lesage

 

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