Frédéric Meyrieu

 

Frédéric Meyrieu, aujourd’hui en charge des jeunes au Racing Football Club de Toulon, est revenu sur sa longue carrière pour Foot d’Avant. Ses débuts à l’OM, l’arrivée de Bernard Tapie à Marseille, son prêt au HAC puis à Bordeaux, les années Toulon et ses saisons inoubliables à Lens où il a fait chavirer le public de Bollaert, son passage réussi à Sion, l’ex-meneur de jeu n’a éludé aucun sujet… avant la deuxième partie de l’entretien 100% FC Metz à découvrir dès dimanche 5 décembre.

 

Frédéric Meyrieu, que deviens-tu depuis la fin de ta carrière de joueur de football professionnel ?
Je suis en charge des jeunes au Racing Football Club de Toulon. C’est là où j’ai commencé quand j’étais gamin avant de rejoindre le centre de formation de l’Olympique de Marseille. Ça va faire neuf ans que je suis ici. Le club était un peu en perdition et j’essaie d’amener ma pierre à l’édifice pour que ça reparte. Nous n’avons pas de seniors, il n’y a que des jeunes, des U6 aux U20.

Tu as arrêté ta carrière en 2002. Qu’est-ce que tu as fait juste après ?
J’en ai profité pour finir les travaux de ma maison dans le Var et je me suis occupé de mes enfants.

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Revenons sur ton début de carrière. Comment es-tu recruté par Marseille en 1984 ?
A l’époque, j’avais 15 ans et j’étais en cadets au Racing Football Club de Toulon. Je jouais dans la même équipe que Patrice Eyraud et Franck Leboeuf. Gérard Gili est venu plusieurs fois nous voir jouer en détection. Il a fait signer Patrice et moi à l’OM. A l’époque, c’était le grand club du Sud mais un peu en perdition car il était en deuxième division. Je suis arrivé l’année où l’équipe des minots est remontée en D1. Moi le Toulonnais qui arrivait à Marseille, c’était quelque chose parce qu’il y a une rivalité entre les deux clubs. C’était une satisfaction de pouvoir intégrer le centre de formation d’un club professionnel.


Comment se déroulent tes premiers mois à l’OM ?
C’était dur avec l’éloignement familial. Même si j’étais à 60 kilomètres de Toulon, je voyais beaucoup moins mes parents. A l’époque, je m’entraînais deux fois par jour et il y avait classe après les entraînements. Ce n’était plus une école normale, donc j’étais un peu coupé du monde. J’ai eu la chance d’intégrer très rapidement l’équipe réserve en troisième division. C’était un sacré niveau. Sur le plan mental, j’étais costaud. C’était l’un de mes principaux points forts. J’ai rapidement joué avec des joueurs de renom comme Marc Pascal, José Anigo ou Jacques Lopez. J’en ai reparlé récemment avec Eric Di Meco, avec ce groupe là, je n’avais pas de complexe. J’étais timide dans le vie mais je devenais un autre homme sur le terrain. S’il y avait un corner ou un coup-franc, je n’hésitais pas à dire « je le prends », même si j’avais 17 ans.


Tu joues ton premier match en D1 lors d’OM-Nancy en 1985 (2-3). Quels souvenirs gardes-tu de cette rencontre ?
Il y avait une flopée d’attaquants blessés donc je me suis retrouvé en pointe. Un joueur de Nancy avait mis un but de 35 mètres dans la lucarne. Ça m’avait marqué. C’était la période où le Stade Vélodrome commençait à se remplir même si on jouait le maintien. Personnellement, j’avais la chance d’avoir le soutien du public parce que j’étais un jeune qui sortait du centre de formation et je mouillais le maillot.


« Quand des bruits annonçaient la probable arrivée de Bernard Tapie en 1986, on n’osait pas y croire. Finalement, on le voit débarquer un jour et il annonce qu’il reprend le club. Et là, l’OM s’est vite transformé »


C’était comment le Stade Vélodrome des années 80 ?
Là on parle du match de Nancy, ce n’était pas plein, mais les années qui ont suivi, j’ai connu un Stade Vélodrome en ébullition. Sur la pelouse, on sentait le stade qui tremblait. C’était un truc de dingue. C’était vraiment quelque chose de particulier. A l’époque, il pouvait monter jusqu’à 45 000 personnes. Tous les gens étaient debout. Comparé à avant, c’est la folie douce aujourd’hui le Vélodrome.


Le Stade Vélodrome était encore plus chaud que maintenant ?
Ah bien sûr. Quand il n’y a pas de résultats aujourd’hui, les supporters sont gentils par rapport à ceux de notre époque. J’ai vu des joueurs sortir du Vélodrome dans le coffre des voitures et avec leur femme au volant.


Bernard Tapie est arrivé à l’OM en 1986. Comment était organisé le club avant son intronisation ?
Le club était reconstruction avec le président Jean Carrieu. L’entraîneur était Zarko Olarevic et Gérard Gili était à la formation. L’OM venait de remonter donc on entendait encore parler des gloires du passé comme Roger Magnusson, Josip Skoblar et Jairzinho. Bernard Tapie, on le connaissait pour ses performances dans le cyclisme, et ses titres aux côtés de Bernard Hinault et Greg LeMond. Quand des bruits annonçaient sa probable arrivée, on n’osait pas y croire. Finalement, on le voit débarquer un jour et il annonce qu’il reprend le club. Et là, l’OM s’est vite transformé.


Quels éléments a-t-il mis en place pour faire évoluer le club à vitesse grand V ?
Il s’était bien renseigné sur le football pour s’entourer des meilleurs. Il a rapidement ramené un professionnalisme au club en ne laissant rien au hasard. Il avait beaucoup d’ambitions. Il avait envie de réaliser ses rêves et il a tout mis en œuvre pour y arriver. Ç’a commencé par le staff technique, le staff médical, où il avait recruté le médecin Jacques Bailly, qui officiait sur circuit de tennis professionnel et Jean Duby, le médecin de Peugeot Moto Sport. A l’époque, il a fait venir Michel Hidalgo et Gérard Banide. Avant son arrivée, on s’entraînait sur des terrains en bord d’autoroute, à côté d’une usine de chocolat.


Tu étais un très jeune joueur à l’époque. Quelles discussions pouvais-tu avoir avec Bernard Tapie ?
Quand je suis revenu de mon prêt au Havre (ndlr : 1987-88) et de mon service militaire, j’ai enchaîné beaucoup plus de matches en tant que titulaire à l’OM. Et en 1989, on gagne le doublé. Après Bernard Tapie, il me disait qu’il comptait sur moi, que je n’avais pas de soucis à me faire pour mon avenir. J’avais la tête sur les épaules, je savais que je devais prouver chaque jour pour gagner ma place. A l’époque, il n’y avait que treize noms sur la feuille de match. Treize, dans un effectif de vingt-cinq ou trente joueurs, ce n’est pas la même chose. Ceux qui ne jouaient pas, ils allaient en D3 ou restaient à la maison.


« Pour apprendre il faut regarder, et j’étais bien servi avec Alain Giresse »


A l’OM, tu as joué avec Alain Giresse au milieu du terrain. C’était comment d’évoluer à ses côtés ?
Déjà, j’avais joué avant contre lui quand il était à Bordeaux. Lorsque j’ai su qu’il venait à l’OM, j’ai ressenti une grande joie. C’était un joueur exceptionnel. Il fait partie de ceux qui m’ont le plus appris avec Klaus Allofs. Alain avait tout compris avant de recevoir le ballon. Ce n’est pas le tout d’avoir des qualités technique et physique, il faut aussi l’intelligence de jeu. C’est ce qui fait la différence entre les bons joueurs et les très bons joueurs. Lui avant de recevoir la balle, il avait photographié le placement de ses partenaires et de ses adversaires. C’était phénoménal et un plaisir de le voir jouer. En plus quand il y a la technique qui va avec, c’était un régal. Pour apprendre il faut regarder, et j’étais bien servi avec Alain Giresse.


Comment s’est passée ta saison en prêt au HAC, sous la coupe de Didier Notheaux…
Ça s’est bien passé, malheureusement, on n’a pas pu se maintenir. Quand je suis arrivé au Havre, le club avait pas mal de retard au classement. On était parti faire une préparation à Chypre dans l’espoir de se maintenir et je n’ai jamais autant souffert physiquement de ma vie. Il restait 27 matches de championnat et j’avais enchaîné les rencontres. Il y avait aussi des hommes de qualité au HAC avec Alain Casanova dans les buts, Philippe Jacquet, Ladislav Vizek, Jacky Bonnevay ou Jean-Roch Testa. Malheureusement, on est relégué à la dernière journée face au PSG de Dominique Rocheteau. On perd ce match et c’est dommage car on avait fait beaucoup d’efforts pour recoller. Après le HAC, c’était un très bon club de foot avec un public connaisseur. J’ai bien aimé ce passage au Havre.


Tu reviens à Marseille en 1988-89. Le club comptait notamment Eric Cantona, Jean-Pierre Papin, Franck Sauzée ou Eric Di Meco dans son effectif. L’OM avait vraiment changé…
L’effectif avait pas mal changé. C’était le renouveau de l’OM. Le club était reparti. Il y avait de l’ambition et des moyens pour permettre à l’Olympique de Marseille de retrouver le haut du classement.


C’était comment d’évoluer avec les Jean-Pierre Papin ou Eric Cantona ?
Les débuts de Jean-Pierre Papin à l’OM n’ont pas été faciles. Il a mis du temps pour s’adapter mais une fois qu’il a trouvé la confiance et marqué des buts hors du commun, c’est devenu un joueur exceptionnel. A la fin des entraînements, je restais 30 ou 45 minutes pour lui mettre des centres afin qu’il travaille devant le but. Quand on était jeune, on avait pas trop le choix en fait. Et c’était un plaisir aussi. Quant à Eric Cantona, c’est pareil, quel joueur ! Il avait un caractère, une aura qui sortait de l’ordinaire. En 1988-89, l’OM est monté crescendo avec un effectif bien fourni pour finalement remporter le titre de champion de France.


Tu avais 20 ans lors de cette saison. Quel était ton statut au sein de cette nouvelle équipe ?
Moi à l’époque, je jouais beaucoup sur le côté gauche, je n’étais pas encore trop recentré. Il m’est arrivé aussi de rendre service en attaque. J’étais le jeune et bien aimé par les joueurs cadres, ceux que tu as cités, mais également les Bruno Germain, Eric Di Meco, Franck Sauzée ou Karlheinz Förster, un super mec aussi.


« A Toulon, au bout d’un an, on n’était plus payé régulièrement… Mentalement, c’était très dur. Il a fallu que je quitte la maison où j’habitais. Je suis retourné vivre chez ma mère »


Quels souvenirs gardes-tu du titre de champion de France 1989 ?
C’était fabuleux. En plus, c’est un titre qu’on va chercher à la 93e minute contre le PSG avec ce but de Franck Sauzée, à 25-30 mètres dans la lucarne. Le Stade Vélodrome était en ébullition. Là, je peux te dire que c’était quelque chose de fantastique. En plus, on avait accroché la finale de la Coupe de France. Cela faisait longtemps que ce n’était plus arrivé à l’OM. C’était un grand moment dans ma carrière de footballeur.


Pourquoi pars-tu à Bordeaux en 1989 ?
Je veux me faire prêter de nouveau car il y a de plus en plus de grands joueurs qui arrivent à l’OM. Chris Waddle avait notamment signé. Là, je me dis que si je veux jouer, je dois aller voir ailleurs. Il y a donc une possibilité d’aller à Bordeaux, et un échange se fait avec Eric Cantona. Finalement, avec les Girondins, je ne joue pas trop. Je tombe sur un entraîneur, Raymond Goethals, qui ne me fait pas trop confiance. Je joue une dizaine de matches sur les 38 journées. D’ailleurs, Bordeaux a perdu le titre en fin de saison contre l’OM car le coach ne faisait pas assez tourner l’effectif. C’est dommage car il était énorme. C’était la première saison de Bixente Lizarazu et Christophe Dugarry était en train d’arriver. En comptant les remplaçants, il y avait de quoi faire une équipe type de D1, avec notamment Bernard Genghini, William Ayache, Manfred Kaltz, Stéphane Paille, etc… Après, on avait une superbe équipe aussi avec Jean-Philippe Durand, Bernard Pardo, Jesper Olsen, Klaus Allofs, Patrick Battiston, Jean-Christophe Thouvenel ou Piet Den Boer.


Un an plus tard, tu t’engages à Toulon…
Je reviens à l’OM après mon prêt à Bordeaux et comme Marseille continuait sur sa lancée, Rolland Courbis a appelé Bernard Tapie pour me recruter. J’étais en fin de contrat et j’ai signé au Sporting Club de Toulon pour trois saisons.


Sauf que Rolland Courbis n’est plus aux commandes quelques semaines plus tard…
Toulon, c’était particulier parce que je revenais chez moi. A l’époque, Toulon était un club qui vivotait dans le milieu du classement. Rapidement, il a connu des problèmes financiers. On a réussi à se maintenir, à faire une ou deux saisons intéressantes avec de bons joueurs comme Antoine Kombouaré, Franck Passi, Leonardo Rodriguez, Peter Bosz, Philippe Thys, etc… Mais la troisième saison, le club dépose le bilan et est donc relégué.


A partir de quand les joueurs ont commencé à ne plus être payé en temps et en heure ?
Au bout d’un an, on n’était plus payé régulièrement. Il manquait six mois de salaire et ce retard on l’a traîné pendant deux ans et demi. Il fallait quand même jouer et rester professionnel, même si des joueurs sont partis. On a réussi à tenir la baraque malgré tout. Mais mentalement, c’était très dur. Il a fallu que je quitte la maison où j’habitais. Je suis retourné vivre chez ma mère. Imagine, j’étais joueur professionnel, j’avais presque 25 ans. C’était une période compliquée. Dès que le club a déposé le bilan, il fallait partir et j’ai eu une proposition de Lille.


« Une ou deux fois par mois, j’inaugurais des bars ou des magasins avec des supporters lensois. A chaque fois, il y avait environ mille personnes dans la rue. C’était de la folie »


Pourquoi signes-tu finalement à Lens en 1993 ?
Quand j’atterris à Lille, mon agent me dit : « J’ai un message de Gervais Martel, est-ce que ça te dit qu’on aille discuter et manger avec eux ? ». Je lui ai répondu : « pourquoi pas ». Finalement, j’ai opté pour Lens pour deux saisons. Pourtant, quand je suis arrivé le 15 juin, c’était un peu « Bienvenue chez les Ch’tis » : il pleuvait et faisait froid. Mais après, moi ce que je voulais surtout, c’était être payé entre le 1er et le 5 du mois pour avoir une vie de famille normale. Sportivement, j’ai choisi Lens parce que j’avais France Football dans les mains, j’ai comparé les compos des deux équipes et je me voyais plus jouer à Lens. Je pense avoir fait le bon choix car j’ai joué la Coupe d’Europe et j’ai cassé la baraque sur le plan personnel. Pendant ma période lensoise, il y a même eu des clubs étrangers qui sont venus à la charge.


Quels clubs étrangers se sont intéressés à toi ?
Il y avait le FC Séville et West Ham. Mais j’étais tellement bien à Lens, il y avait un super public et de l’engouement. En plus, on a rapidement été qualifié pour la Coupe d’Europe. J’avais un jeu spectaculaire, j’aimais faire des talonnades ou des râteaux et ça enflammait le Stade Bollaert. J’étais tellement content de jouer pour Lens que j’ai resigné deux ans.


Justement, quels étaient tes rapports avec le public lensois ?
On avait une relation exceptionnelle. Une ou deux fois par mois, j’inaugurais des bars ou des magasins avec des supporters. A chaque fois, il y avait environ mille personnes dans la rue. C’était de la folie. Quand on mouille le maillot, qu’on est performant et qu’on ne trahit personne, les supporters sont reconnaissants. Ils venaient quotidiennement en masse à l’entraînement et faisaient des photos avec les joueurs ou demandaient des autographes. Tout ça rendait le club à part. Cela a changé quelques années plus tard avec l’installation de cordons de sécurité, l’accès aux entraînements est devenu plus compliqué.


A Sedan, Cédric Mionnet prenait des bières avec les supporters. C’était pareil pour toi ?
Oui bien sûr, ça m’est arrivé. Ce sont des gens très respectueux. Si on consacre un peu de temps pour discuter, pour eux c’est énorme. Car ils donnent tout pour se payer un abonnement et la tenue du RC Lens. C’était un des seuls clubs en France où tout le public était habillé de la tête aux pieds en Sang et Or. Il y avait le grand-père, le fils et le petit-fils. Lens est une institution. Quand j’y habitais, la ville comptait environ 33 000 habitants et le stade accueillait 45 000 personnes. Ça résume l’engouement et ça concernait tout le Nord.


As-tu l’impression d’avoir passé un cap à Lens ?
C’était déjà un peu le cas à Toulon où j’ai été repositionné en numéro 10. Lors des derbies contre l’OM, je marquais quasiment à chaque match. A Lens, j’ai atteint une nouvelle dimension car on a joué rapidement en Coupe d’Europe. Puis le RC Lens était plus médiatisé que le Sporting Club de Toulon. J’ai aussi marqué pas mal de coups-francs.


« François Omam-Biyik était un joueur phénoménal, il montait à deux mètres de haut. Sur corners ou coups-francs, je mettais des ballons tendus à une certaine hauteur, il les déviait et ça faisait souvent ficelle »


Quelle était l’ambiance au sein du RC Lens avec les joueurs du cru comme Eric Sikora ou Jean-Guy Wallemme ?
Il y avait une très bonne ambiance. On sentait une mentalité différente par rapport au Sud. Tous les mercredis, on organisait un repas entre joueurs et femmes de joueurs. Je n’avais pas connu ça ailleurs. Il n’y avait pas d’obligation et à chaque fois, il y avait plus de la moitié de l’équipe dans un resto. Ce sont ces détails qui permettent aux joueurs de créer des liens. C’est important.


A Lens, tu as joué avec plusieurs très bons attaquants comme Roger Boli, Joël Tiehi ou Tony Vairelles. Avec quel joueur avais-tu la meilleure relation technique ?
Moi j’étais passeur donc je m’adaptais à tous les joueurs. Il y avait également François Omam-Biyik. C’était un joueur phénoménal, il montait à deux mètres de haut. Sur corners ou coups-francs, je mettais des ballons tendus à une certaine hauteur, il les déviait et ça faisait souvent ficelle. C’était un sacré joueur de tête. Roger Boli, la saison où il finit meilleur buteur (1993-94, 20 buts), je suis souvent passeur. On en rigolait quand on regardait le résumé de la saison et tous ses buts. Joël Tiehi, ce n’était pas le même profil, mais c’était l’attaquant finisseur, capable de se créer lui-même des occasions car il était déroutant dans ses dribbles pied droit et pied gauche. Quant à Tony Vairelles, il a dû s’adapter au départ. C’était un joueur qui ne lâchait rien et allait même chercher des buts lui-même. Il a fait de belles saisons à Lens.


Vous avez souvent joué la Coupe de l’UEFA avec Lens. Quel sont tes souvenirs marquants ?
J’avais de bonnes statistiques en Coupe d’Europe. Je marquais sur plus d’un match sur deux. Mais je me souviens notamment de l’ambiance au Stade Olympique de Rome. On ne s’entendait pas sur la pelouse, même si on était à un mètre. En Coupe d ‘Europe, je me souviens aussi de ce match au Slavia Prague (8e de finale, 1995) où on est tout proche de passer. Il y avait une sacré équipe à l’époque avec Karel Poborsky ou Vladimir Smicer.


Ton aventure avec Lens s’est arrêtée en décembre 1996. Le RC Lens t’a reproché « un défaut de comportement », selon les termes de l’époque. Que s’est-il réellement passé ?
Ça, c’était la grosse excuse. En plus, j’étais capitaine à cette période. L’entraîneur était Slavo Muslin. Depuis le début de la saison, il n’arrêtait pas de répéter : « on n’a pas de chance ». Quand tu arrives au mois de décembre et que rien ne change, ce n’est plus une question de chance. Un jour, j’ai pris la parole : « Écoutez coach, à un moment donné, il faut qu’on se fasse violence car ce n’est pas qu’une question de chance ». Tout l’effectif était d’accord avec moi sauf que lui l’a super mal pris. Il a été voir son ami Jean-Luc Lamarche, qui était directeur sportif de Lens. Il n’a pas trouvé mieux d’aller voir Gervais Martel pour dire que Slavo Muslin ne voulait plus de Fred Meyrieu. Et là, les gens ont manifesté dans la rue à Lens pour ne pas que je parte. Finalement, le club a patienté jusqu’à la fin décembre, soit la clôture du mercato hivernal de l’époque, et m’a annoncé le 31 qu’il ne voulait pas me garder. Guy Roux voulait me récupérer mais ne savait pas ce qui s’était passé. Le bruit qui courait à l’époque était que j’avais frappé un entraîneur. Du coup, la seule chose que Lens a trouvé à dire était que j’avais eu un « problème de comportement ». Pourtant, sportivement, j’étais irréprochable et performant.


Malgré ça, le président Martel t’a laissé partir…
Le président était venu me voir en disant : « Fred, je suis emmerdé, je n’ai pas le choix. Tu te rends compte, c’est l’entraîneur, je ne peux pas faire autrement ». Il a préféré virer le joueur que l’entraîneur. Je lui avais dit : « Vous me virez, mais ce n’est pas ça qui va créer le choc psychologique ». Cela n’a pas manqué : un mois après il écarte Slavo Muslin pour le remplacer par Roger Lemerre. Donc quelque part, j’avais un peu raison.

 

Outre Auxerre, avais-tu d’autres options ?
J’avais eu des touches avec un club anglais, le Bétis Séville, puis finalement le FC Sion s’est manifesté. Pour rebondir, je me suis dit que c’était peut-être la meilleure solution d’aller dans un club francophone parce que j’arrivais en cours de saison. Quand Lens a appris que j’allais à Sion, ils se sont rapprochés de Philippe Vercruysse pour faire oublier Fred Meyrieu, parce que ça avait été chaud avec les supporters. Quand j’arrive en Suisse, Sion est cinquième à cinq ou six points du leader, le Grasshopper Zurich de Stéphane Chapuisat et Kubilay Türkyilmaz. Le président me dit : « il faut être champion ». Finalement, on gagne le titre. J’ai fait six mois exceptionnels. Puis un jour, je vois quelqu’un à l’intérieur d’une voiture qui regarde l’entraînement du FC Sion. Et là, je vois sortir Bernard Zénier, que j’avais côtoyé à Toulon. C’était le recruteur du FC Metz et il était venu superviser Vladan Lukic. De là on discute et il me propose de venir à Metz. Après ce que j’avais connu à Lens, ma priorité n’était pas de revenir en France mais de fil en aiguille j’ai finalement signé à Metz la saison suivante.


Propos recueillis par Thierry Lesage


Découvrez la deuxième partie de l’interview, 100% FC Metz, le dimanche 5 décembre 2021